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Le mandat en un coup d'oeil - Crédit photo : © Collette Avocat
Crédit photo : © Collette Avocat

Quelle est la portée de l'obligation de reddition des comptes incombant à la tête d'un réseau de distribution commerciale ayant recours au mandat ? 1/2

Auteur : Hugues Collette
Publié le : 24/02/2020 24 février févr. 02 2020



Le contrat de mandat est un contrat encadré par le Code Civil qui renferme une obligation de reddition des comptes en vertu de laquelle, le mandataire doit, outre l'exécution de la mission confiée, rendre compte de sa gestion auprès du mandant.
 
 
La portée de cette obligation mérite d’être analysée de manière approfondie et son exécution anticipée par les parties à un tel contrat, en particulier lorsqu'il s'agit d’un mandat de négociation ou d’un mandat d’encaissement conclu dans le cadre d'un réseau de distribution commerciale.
 
 

Le cadre dans lequel cette problématique se pose

 
 
La tête d'un réseau de distribution commerciale est susceptible d'avoir, au travers d'une centrale de référencement ou d'achats, conclu un contrat de mandat avec ses membres en vue de faciliter les négociations et les paiement avec les fournisseurs.
 
 
Pour établir l’existence d’un tel mandat, il faut rapporter la preuve d’« un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom » (Article 1984 du Code civil).
 
 
La jurisprudence a eu l’occasion de retenir l’existence d’un mandat, en présence de clauses expresses et non ambiguës.

 
En présence de clauses plus obscures, les tribunaux recourent à la commune intention des parties (CA Lyon 8 novembre 2007 n°05/06933).
 
 
En revanche, la jurisprudence a rejeté la qualification de mandat, en présence de clauses imprécises (CA Rennes 3 juin 2008 n°07/02085 ; CA Lyon 31 janvier 2008 n°06/00187 ; CA Lyon 15 novembre 2007 n°06/01059) ou en présence d’un simple engagement de mettre en relation deux parties, qualifiable de contrat de courtage (Cass. com. 3 avril 2012 n°11-15518).

 

Ce que la qualification de mandat induit pour le mandataire : la reddition des comptes

 
 
Si la tête d'un réseau de distribution commerciale a effectivement conclu un contrat de mandat avec chacun de ses membres alors elle est tenue comme tout mandataire de « rendre compte de sa gestion, et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant » (Article 1993 Code civil).

 

Cette obligation de reddition des comptes est inhérente au mandat. Au-delà de cette disposition légale, le mandataire est tenu par les termes du contrat de mandat qu'il a conclu.

 
 
En présence d’un mandat de négociation, cette obligation s’entend principalement comme le devoir du mandataire d’informer le mandant de l’issue des négociations menées par lui.
 
 
En présence d’un mandat d’encaissement et de redistribution, cette obligation s’entend généralement du devoir du mandataire de restituer l’ensemble des sommes qu’il a perçues au titre du mandat, et de justifier de tout prélèvement effectué sur celles-ci.
 
 
Dans ce dernier cas de figure, la jurisprudence a eu l’occasion de rappeler qu’il incombe au mandataire de :
 
 
  • « justifier de l’utilisation des fonds reçus ou prélevés » (Cass. 1ère civ. 12 novembre 2015 n° 14-28016) ;
 
 
  • communiquer tous les documents et informations « nécessaires pour vérifier le montant des commissions susceptibles » d’être dues au mandant (Cass. com. 11 juin 2013 n°12-17634 ; 31 janvier 2012 n°11-11716 ; 25 novembre 2014 n°13-24306).
 
 
Le mandataire doit justifier de son respect de son obligation contractuelle de reddition des comptes (CA Colmar 5 octobre 2018 nº 16/01192 ; CA Nîmes 11 avril 2019 n°17/04452). A défaut, le mandataire est susceptible d’engager sa responsabilité contractuelle envers le mandant.
 
 
Si l’obligation de reddition des comptes du mandataire a été exécutée au moins partiellement, « il appartient au mandant d'établir en quoi les comptes, une fois rendus, comportent des insuffisances ou anomalies » ou de rapporter la preuve d’une faute de gestion de la part du mandataire (CA Colmar 5 octobre 2018 n°16/01192).
 
 

Remarques conclusives

 
 
La portée de cette obligation de reddition des comptes s’analyse principalement à l’aune des termes contractuels gouvernant la relation entre les parties.
 
 
Mais elle ne s’arrête pas uniquement à ce que les parties ont expressément convenu puisque in fine, l’obligation de reddition des comptes vise à permettre au mandant de s’assurer par lui-même du respect de la mission confiée au mandataire.
 
 
De sorte que le champ précis de ce qui doit être communiqué à ce titre par le mandataire n’est pas précisément arrêté et doit s'apprécier au cas par cas. Il en va ainsi de toute tête de réseau de distribution commerciale ayant reçu et accepté un mandat de la part de ses membres.


L'exécution d'une telle obligation de reddition des comptes est donc une question délicate qu'il faut en particulier pour le mandataire anticiper, au risque de créer un différend sur ce qui aurait dû selon le mandant lui être transmis au titre de la reddition des comptes et qui en pratique ne lui a pas été communiqué.
 
 
La question de l’étendue du devoir du mandataire au titre de cette obligation, c’est-à-dire l’articulation du conflit de normes entre le droit à l’information du mandant sur l'exécution de la mission et la protection du secret des affaires du mandataire, a tout particulièrement été discutée par la jurisprudence dans des contentieux nés au sein de réseaux de distribution commerciale.

Partie 2/2 de l'article

 

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